Perte de contrôle

Le monde d’aujourd’hui va toujours plus vite et l’on peut avoir le sentiment de ne plus rien contrôler et d’être dépassé par la technologie. Ce sentiment est encore accentué par le fait qu’il est communément admis qu’être assisté est à la fois bien et normal. Nous avons un « tiers de confiance » pour tout, la banque contrôle votre argent et votre épargne, l’état est garant de votre sécurité, les géants informatiques contrôles vos données et vos communications…

Pourtant dans l’expression « tiers de confiance » il y a la notion de confiance justement. Et je ne sais pas vous, mais je n’accorde généralement pas ma confiance en quelqu’un que je ne connais pas. Encore moins pour lui confier mon argent, ma sécurité ou ma correspondance. Pourtant vous ne connaissez probablement pas votre banquier, votre agent de quartier ou le fabriquant de votre téléphone au point de savoir si vous pouvez réellement lui faire confiance ou non.

Cependant, nous confions tous une grande partie de notre argent aux banques. Mais saviez-vous qu’elle ne possède en réserve que 10 pourcents de la somme totale de tout les comptes  ? Ce qui signifie concrètement que si l’ensemble de la population souhaite retirer son argent en même temps, les banques ne seront capables de vous rendre que 10 pourcents de « votre » argent, cela s’appelle la réserve obligatoire… Le reste de votre argent est alors placé ou prêté à des particuliers et à des entreprises afin d’en obtenir un rendement bien supérieur à ce qu’elle vous propose. Cela ne pose soit disant pas de problème tant que tout le monde ne veut pas retirer son argent en même temps. Les banques ont également l’autorisation de prélever sur nos comptes épargne en cas de souci financier de leur côté, comme cela a déjà été le cas à Chypre en 2013. Comment faire confiance à quelqu’un qui ne garde pas la totalité de l’argent que vous lui confié et qui en plus peut s’en servir pour régler ses propres problème financier…

Notre sécurité est également presque totalement laissée sous contrôle de l’Etat. Il aura malheureusement fallu attendre des événements tragiques pour réveiller certaine personne. Depuis les attentats, nous nous sommes un peu réveillé et de plus en plus de monde se forme aux premiers secours et au technique de combat (armé ou non). Nous voulons reprendre un peu d’autonomie sur ce sujet-là.

De la même manière, toutes nos communications dépendent aujourd’hui de grandes sociétés informatique que nous ne connaissons pas. Nos appels téléphoniques, nos SMS, no chats sur les réseaux sociaux… tout cela est hors de notre contrôle et pour beaucoup de personne il s’agit d’une fatalité et ce n’est pas grave. Jusqu’il n’y a pas si longtemps pourtant, les lettres étaient scellées afin de garantir que personne d’autre que le destinataire ne la lirait.

Prise de contrôle

Les êtres humains ont des besoins fondamentaux qu'ils doivent remplir pour vivre. Par exemple, nous avons besoin de conserver notre intégrité physique, de réguler notre température, d'avoir de l'eau potable, de quoi manger... Or aujourd'hui, dans notre société, nous avons délégué nos moyens de remplir ces besoins. Savez-vous comment sont fabriquées les substances pharmaceutiques qui vous soignent et comment elles agissent ? Savez-vous comment fonctionne l'isolation thermique et le chauffage de votre habitat ? Maîtrisez-vous votre accès à l'eau potable ? Savez-vous d'où et comment vous provient votre nourriture ?

Si oui, alors vous faites partie d'une minorité de gens qui ont le contrôle sur leurs besoins vitaux. Mais beaucoup d'entre nous ont perdu cette maîtrise au profit de structures extérieures (industries pharmaceutique, agro-alimentaire, du bâtiment...).

L'intimité est l’un des autres besoins importants de l'humain, comme nous l'avons vu. Et là aussi, sa gestion a été délégué à des services extérieurs. Beaucoup de personnes ont l’impression que cette perte de contrôle est inévitable et que les systèmes en place sont tellement grands qu’on ne peut pas y échapper.

Comment avoir de l'eau potable si nous ne passons pas par le réseau de distribution des eaux ? Comment se soigner si nous ne passons pas par les structures de santé ? Comment avoir accès à tous les bénéfices d'internet si nous n'acceptons pas la collecte de nos données ? Nous pensons que les seuls choix qui s'offrent à nous sont soit de renoncer, soit d'accepter. Finalement, nous sommes plus dans une situation de non-choix que de choix véritable...

Aujourd’hui, notamment dans le contexte occidental du 21eme siècle, l’Homme semble osciller entre deux extrêmes : une impression de toute puissance, inculquée par la société (beaucoup ont été éduqués dans l’idée qu’avec assez de motivation, nous pouvions devenir et accomplir ce que nous voulons, sans limite de grandeur), et une impression de complète impuissance (Que faire face aux Grands Géants de l’industrie ? Que faire face aux catastrophes climatiques qui nous dépassent de très loin?).

Osciller entre ces deux extrêmes nous plonge dans une certaine angoisse existentielle. Comment gérer cette pression sous-jacente à accomplir de grandes choses ? Et quelle terrible impression que de dépendre entièrement d’entités dont on ne perçoit même pas les contours...

Or, si la notion de toute puissance est fausse (non, vous ne pouvez pas léviter, même avec toute la motivation du monde. Oui, vous avez des limites.), la notion de complète impuissance l’est tout autant. Il est important de repositionner notre curseur entre ces deux extrêmes, et de prendre conscience de notre sphère d’influence. Entre la fausse toute-puissance et la fausse impuissance, il existe une grande zone de choses que vous pouvez contrôler, et sur lesquelles vous pouvez agir : vos choix relationnels, vos choix alimentaires, votre façon de voir les choses, votre façon de communiquer, vos habitudes quotidiennes, votre volonté de vous former...

L’exemple de notre sécurité nous prouve qu’il est possible de reprendre la main sur nos besoins fondamentaux. Se former aux premiers secours, obtenir une arme, apprendre à tirer, maîtriser un sport de combat… tout cela prend du temps mais est possible. La fréquentation des formations touchants à la sécurité personnelle n’a jamais été si élevée.

Des alternatives aux systèmes bancaires traditionnels sont également apparues suite à la crise de 2008. Nous en parlerons dans ce livre, ces alternatives étant fortement liées à l’informatique.

Des solutions permettant de contrer la surveillance de masse et de préserver nos libertés existent quant à elles depuis longtemps. Bien que le problème de la surveillance de masse ait principalement été révélé par Edward Snowden en 2013, le sujet de la liberté numérique à toujours été au cœur des préoccupations de certain visionnaire (voir la Déclaration d’indépendance du cyberespace de John Perry Barlow en 1996).

Malheureusement les géants du web ont pris une place tellement grande que la plupart ne sont simplement pas au courant. Et c’est tout le but de ce livre, de vous informer et de vous former.

Petit à petit vous allez apprendre quelles alternatives existent et pour quelle fonction. Le changement ne se fera pas en un jour, mais vous avez le pouvoir de reprendre le contrôle et de devenir un citoyen plus autonome. Le bonheur de se sentir libre et sortir de ce cercle vicieux de non-choix vous permettra de devenir acteur dans toute votre sphère d’influence, et de permettre ensuite à d’autres de le devenir.

On y va ?